Pour commencer, sachez que, même si le congé d'allaitement a été aboli dans les années 70, il est possible de prolonger son congé maternité. Déjà, vous pouvez éventuellement y accoler tous les congés payés et RTT que vous avez en réserve. Ensuite, votre médecin (gynécologue ou généraliste, peu importe) peut vous prescrire jusqu'à 4 semaines de "suite de couches pathologiques". Attention, cet arrêt est rémunéré par la sécu comme arrêt maladie et non congé maternité, ce qui est moins avantageux. En revanche, certaines conventions collectives ou mutuelles complémentaires le reconnaissent comme congé maternité et le prennent en charge comme tel alors renseignez-vous ! Toutefois, la sécurité sociale contrôle de plus en plus les arrêts de travail, ça devient donc de plus en plus difficile.
Vos droits
En France, le code du travail autorise une mère allaitante à disposer d'une heure par jour sur son temps de travail, et ce jusqu'au premier anniversaire de l'enfant. Les modalités de disposition de cette heure sont à négocier entre la mère et son employeur. A défaut d'accord possible, le code du travail la fixe à deux demi-heures, une en milieu de matinée et l'autre en milieu d'après-midi. L'employeur n'est pas tenu de rémunérer cette heure.
Les articles du code du travail concernés sont le L224-2 et suivants et le R224-1 et suivants.
Dans la fonction publique, cette heure pour allaitement est également mentionnée dans les autorisations d'absence : Congés Fonction Publique. Malgré cela, les fonctionnaires (d'Etat ou territoriaux) et assimilées fonctionnaires se voient souvent refuser les pauses d'allaitement au motif d'une circulaire de 1997 disant que sauf dans les cas où le lieu de travail comporte une crèche et où l'enfant y est gardé, il ne saurait être question d'accorder à la mère des pauses d'allaitement.
Interrogée par La Leche League France, Martine Herzog-Evans, maître de conférences en droit, nous a répondu qu'« une circulaire n'étant pas une véritable norme juridique, cela veut dire que le droit de la fonction publique est muet sur le sujet. Or dans ce cas, « la jurisprudence (arrêt Conseil d'Etat Dame Peynet, du 8 juin 1973) est claire : lorsqu'il y a un trou dans le droit de la fonction publique (y compris des collectivités territoriales), le droit social commun doit s'appliquer, et cela constitue même un principe général du droit. » (Source : site web de LLLFrance)
Pré-requis : la lactation
La production lactée dépend de la sécrétion d'une hormone : la prolactine. Elle est sécrétée en abondance en début d'allaitement par une glande située à la base du cerveau qui s'appelle l'hypophyse et présente des pics lors des tétées. C'est pourquoi la fabrication du lait répond à la loi de l'offre et de la demande : chaque tétée induit un pic de prolactine qui ordonne de fabriquer davantage de lait, donc plus le bébé tète et plus il y a de lait. On appelle cela le contrôle exocrine de la sécrétion lactée : la lactation dépend de la sécrétion de prolactine par l'hypophyse.
Cet impact de la prolactine diminue avec le temps et revient à peu près à son niveau d'avant la grossesse vers les 6 mois post-partum. Les pics sont beaucoup plus faibles et se met alors en place un contrôle autocrine de la production de lait, c'est à dire un contrôle par les seins eux-mêmes. On appelle également ce phénomène la "lactation automatique" bien que ce ne soit pas un terme très approprié. Ce qui est important à savoir, c'est que, la production ne dépendant plus des pics de prolactine, il est moins dangereux de réduire le nombre de tétées quotidiennes. Je dis "moins dangereux" parce que le nombre de tétées qu'il faudra maintenir pour entretenir la lactation varie d'une maman à l'autre et qu'il convient de rester prudente parce que la loi de l'offre et de la demande est toujours de mise.
Avec un bébé non diversifié
Si vous désirez conserver un allaitement exclusif, il vous faudra éventuellement tirer votre lait sur votre lieu de travail. Pour cela, les pauses d'allaitement mentionnées plus haut trouvent toute leur utilité. Concernant le matériel nécessaire, je vous renvoie au dossier très complet que j'ai rédigé sur la question : Tirer son lait. Vous y trouverez toutes les informations nécessaires sur comment tirer son lait, le conserver et le donner au bébé. Vous voudrez peut-être faire des réserves au congélateur avant votre reprise. Si c'est le cas, ne paniquez pas si vous constatez que vous n'obtenez pas de grandes quantités de lait, c'est normal mais vous tirerez bien plus quand vous aurez repris puisque votre bébé ne sera pas présent pour téter. Ne vous étonnez pas non plus de ne pas tirer tous les jours les mêmes quantités. Pour commencer, un tire-lait n'est pas aussi efficace que le bébé, ensuite, la fatigue et le stress de la reprise peuvent influer sur votre lactation, donc ménagez-vous.
Si vous ne pouvez pas ou ne voulez pas tirer votre lait, vous pouvez pratiquer un allaitement mixte en faisant donner un lait artificiel en votre absence. C'est possible mais n'oubliez pas qu'avant 6 mois, il peut être très dangereux de réduire le nombre de tétées, essayez donc de conserver au moins 4 stimulations par 24h. On entend souvent dire qu'on peut continuer à allaiter avec une tétée le matin et une le soir mais à ce stade de l'allaitement beaucoup trop peu pour maintenir la lactation. En tout état de cause, continuez à allaiter complètement à la demande jusqu'à votre reprise ainsi que dès que votre bébé est avec vous : nuits, weekends, vacances, etc. Non, il n'est pas nécessaire de remplacer des tétées par des biberons avant la reprise. Les premiers temps, vous aurez probablement les seins un peu tendus mais votre lactation s'adaptera à ce changement de rythme. Vous pouvez aussi évacuer un peu de lait à la main pour soulager un peu vos seins, c'est rapide à faire aux toilettes (prévoyez un lange).
Dans tous les cas, sachez que rien ne vous oblige à utiliser un biberon, il existe d'autres façons de donner du lait à un bébé : verre, seringue, pipette, soft-cup, tasse anti-fuite, etc. Si vous optez tout de même pour le biberon, sachez que le risque de confusion sein-tétine existe toujours même s'il est plus faible, surveillez-en les signes chez votre bébé : bébé qui se met à pincer le mamelon, qui pleure si le réflexe d'éjection tarde à venir, etc. Malgré les arguments marketing de certains fabricants, une tétine reste une tétine alors restez prudente (mais ne paniquez pas non plus, des tas de bébés ne font jamais de confusion).
Beaucoup de mamans sont confrontées à un bébé qui refuse de prendre le biberon quand elles essaient de lui donner en vue de leur reprise du travail. Alors, faut-il habituer le bébé à ce nouveau mode d'alimentation ? Je dirais que cela dépend beaucoup de votre niveau de zenitude . Beaucoup de mamans n'entreprennent jamais cet apprentissage et laissent faire la nounou et cela se passe fort bien. D'autres sont besoin d'être sûres que leur bébé pourra s'alimenter en leur absence. Si c'est votre cas, sachez qu'il vaut mieux, dans ce cas, que ce soit quelqu'un d'autre que la maman qui lui donne ce biberon : le papa, la mamie, et parfois il faudra même que la maman soit réellement absente.
Quant aux quantités de lait à laisser pour l'enfant, cela fait partie des questions auxquelles je ne sais pas répondre. Pour mon fils, j'avais regardé les quantités sur une boite de lait artificiel mais je crois qu'en fait cela dépend beaucoup des habitudes du bébé : un bébé qui tète très souvent boira de petites quantités à chaque alors qu'un bébé qui tète rarement en boira davantage. Le mieux est souvent de laisser plusieurs petites portions et laisser la personne qui gardera votre bébé gérer la chose.
Avec un bébé diversifié
Les choses sont parfois un peu plus faciles si l'on peut reprendre une fois que le bébé sait manger à la cuillère. Il est alors possible de lui faire donner des compotes et des purées ou, s'il n'en mange pas encore, des laitages à la cuillère. Sachez à ce propos qu'il n'est pas utile de dépenser des fortunes dans des laitages "spécial bébé", tout yaourt classique conviendra très bien.
Vous pouvez bien sûr continuer à tirer votre lait qui reste de toute façon l'aliment de base de votre bébé au moins jusqu'à la fin de sa première année. Insistez auprès de la nounou ou du personnel de la crèche pour que votre lait lui soit donné avant les solides dans un premier temps, surtout si votre bébé a une faible prise de poids : les fruits et légumes ne font pas grossir !